Tortue géante d’Aldabra : L’histoire rocambolesque d’un retour à Madagascar

La tortue d’Aldabra a été réintroduite à Madagascar en 2018. Cette deuxième plus grande espèce de tortue terrestre au monde, après la tortue géante des Galapagos, s’est reproduite depuis. L’on comptabilise 152 tortues qui ont éclos pendant ces cinq dernières années.

Toutes les tortues géantes de Madagascar ont été exterminées par les chasseurs il y a de cela six cents ans. La tortue d’Aldabra descend directement des ancêtres de l’Aldabrachelys abrupta, l’une des deux espèces de tortues géantes qui ont habité Madagascar pendant 15 millions d’années.

600 ans après leur disparition, les tortues géantes de Madagascar font leur retour au pays. L’histoire est fascinante et donne espoir quant à la survie des espèces endémiques et en danger d’extinction, de la Grande île. Tout commence par un projet lancé il y a de cela six ans et dont l’objectif est « de ramener des tortues géantes à Madagascar ». Le projet était mené grâce à une collaboration étroite entre le gouvernement malgache de l’époque et un groupe de travail qui a vu la participation de Miguel Pedrono, spécialiste des tortues. Un premier groupe composé de douze tortues (12) composé de cinq mâles et de sept femelles ont ainsi été ramenées d’Aldabra, une île située à 1000 km au sud-ouest des Seychelles.

Une fois à Madagascar, elles ont été réintroduites dans la réserve d’Anjajavy, au nord-ouest du pays. À en croire Grant Joseph, chercheur à l’Institut Fitz Patrick d’ornithologie africaine, Département des sciences biologiques de l’Université du Cap, Afrique du Sud, la réintroduction de ces espèces dans la réserve d’Anjajavy s’est faite de la façon « moins intimidante que prévu ». Le scientifique avance les fruits des reproductions naturelles des premiers individus réintroduits dans la Grande île. « Deux bébés sont nés l’année suivant leur arrivée à Madagascar et au cours des cinq dernières années, 152 autres tortues ont éclos ».

Repeupler une espèce disparue

Outre la réintroduction des tortues géantes à Madagascar, le projet initié depuis 2018 ambitionne également de garantir la survie de cette espèce. Pour ce faire, les scientifiques misent sur la mécanique de la reproduction naturelle ainsi qu’une attention particulière portée aux bébés tortues. Plus précisément, afin de les protéger des prédateurs potentiels compte tenu de leur petite taille et de leur vulnérabilité. « Tous les bébés tortues ont été emmenés vivre dans une pépinière de tortues à Anjajavy peu après leur naissance, et ils seront relâchés dans la nature une fois que leurs carapaces seront suffisamment grandes pour les protéger des prédateurs ».

L’idée serait de garder les bébés tortues dans un environnement similaire à celui dans lequel elles seront relâchées, le temps qu’ils développent des compétences de recherche de nourriture pour assurer leur survie une fois relâché. Avec toutes ces initiatives, le projet espère avoir 500 tortues géantes sauvages dans la réserve d’Anjajavy d’ici 2030 et environ 2000 d’ici 2040.

Acteurs de la régénération des forêts

« Nous pensons que la réintroduction de la tortue accélérera considérablement la croissance des forêts et des zones boisées ». Ces propos pleins d’espoir de Joseph Grant soulignent l’importance de ces espèces dans la lutte pour la restauration des forêts malgaches. « Des études montrent que les forêts d’ébène sont revenues sur les îles Rodrigues et l’Île aux Aigrettes à Maurice après la réintroduction des tortues géantes » rajoute le scientifique comme pour appuyer la place prépondérante de ces espèces dans la sauvegarde de la biodiversité. Joseph Grant insiste ainsi sur les rôles de germinateur des graines que tiennent ces espèces.

Un rôle qui est indispensable dans la reproduction des arbres endémiques de la Grande île. Les tortues Aldabra jouent également un rôle d’anti incendie. « Les tortues atténuent les incendies en se nourrissant d’herbes sèches ou de feuilles sur le sol forestier, laissant ainsi moins de combustible sec disponible pour les incendies. Les forêts et zones boisées ombragées d’origine de Madagascar ont également limité la propagation des incendies ». Si les ancêtres de cette espèce ont quitté Madagascar pour les Seychelles il y a de cela quatre millions d’années et que les derniers individus datent de six cents ans, les spécimens réintroduits portent l’espoir qu’un jour, le pays sera regarni de ces tortues géantes. Ce, six cents ans après leur extermination née des activités humaines.

José Belalahy

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