« Ils l’ont assassiné de manière très violente. Ils l’ont tailladé puis laissé sa dépouille dans la forêt », nous confie, ému, Louis de Gonzague Razafimanandraibe, président national du réseau Tafo Mihaavo, réseau des communautés gestionnaires des ressources naturelles à Madagascar.
Réseau
D’après les premiers éléments qu’il nous a confiés, Raymond Rakotoarisoa patrouillait dans une parcelle de forêt, à Beparasy, près de la commune de Moramanga, une zone à l’est du pays – limitrophe d’Alaotra Mangoro et Analamanga – avant que les assaillants ne s’en prennent à lui. « C’était un acte prémédité. Les restes de zébu ont été trouvés près de son corps. Ce qui signifie que ceux qui ont commis ce crime ont sacrifié un zébu. Ils ont préparé leur coup », avance notre interlocuteur.
Le vice-président du VOI Manampisoa a été tué dans cette forêt de Beparasy, une zone réellement problématique qui aiguise l’appétit des trafiquants de ressources naturelles. « C’est un réseau très puissant et quasiment impuni qui sévit dans l’Alaotra Mangoro et dans l’Analanjirofo. Nous avons déposé une plainte auprès du tribunal de première instance d’Ambatondrazaka à l’encontre de ce réseau. Mais le dossier est gelé depuis près d’un an. Nous allons saisir le Bianco. Si rien n’est fait, nous alerterons la communauté internationale », soutient Louis de Gonzague Razafimanandraibe.
Procès
Le 1er juin 2022, le meurtre sauvage de Henri Rakotoarisoa dans la même zone, dans la même forêt gérée par les communautés de base, avait ému au-delà des frontières nationales. Henri Rakotoarisoa avait été massacré par un peu moins d’une quarantaine de trafiquants. Âgé de 70 ans, l’activiste dénonçait depuis des années, en vain, les coupes de bois illicites sur la parcelle et effectuées par des locaux.
A l’issue du procès qui s’est tenu le vendredi 18 novembre 2022 à la Cour criminelle d’Ambatolampy, huit personnes reconnues coupables de meurtre ont été condamnées à des travaux forcés à perpétuité à l’issue de l’audience. L’article 2 du décret 2000-027 du 13 janvier 2000 institue les communautés de base dans le processus d’intégration aux communautés de base appelées VOI (Vondron’Olona Ifotony). Dans leur volonté de protéger les ressources naturelles, ils sont souvent confrontés aux intérêts de trafiquants de bois notamment ou de charbonniers. « Les fokonolona sont particulièrement sous pression avec de multiples intimidations qu’ils subissent. Ces drames ne font que renforcer nos ambitions de défendre l’environnement. Nous ne lâcherons rien », soutient le président national du réseau Tafo Mihaavo.
« La protection des forêts par les communautés de base n’est surtout pas une privation des droits d’usage des communautés vivant en périphérie des forêts mais une gestion durable à travers des plans d’aménagement et de gestion dans lesquels des zones d’exercice des droits d’usage des ressources naturelles sont autorisés et ceci conformément aux quotas d’exploitation définis en fonction des potentialités des forêts », souligne le WWF. Une personne aurait été arrêtée dans cette affaire.
📸 © Tafo Mihaavo