Bleen : Sur le volet du savoir-faire et du management, à quels défis font face les aires protégées ?
Masoandro Rakotoarimanana (M.R.) : Le renforcement des compétences et des capacités est essentiel pour accompagner les gestionnaires des aires protégées. Des problèmes et des failles subsistent surtout au niveau de la question managériale. D’après mes constatations sur terrain, la plupart des gestionnaires sont principalement des techniciens spécialisés dans la biodiversité. On peut dire qu’il y a peu de problèmes techniques mais la difficulté se trouve au niveau du management.
Quand on parle de management, qu’est-ce qu’on entend par cela ? Est-ce par rapport à l’aspect humain, matériel ou financier ?
M.R. : C’est un tout, un ensemble, aussi bien les relations humaines, sur tous les plans que sur la partie de la gestion financière et de la logistique.
Bleen : Quels sont les impacts de ces problématiques sur l’état de santé de ces aires protégées ?
M.R. : Les impacts se situent au niveau des relations humaines. Il y a un problème au niveau de la mobilisation de la communauté locale car de nombreuses aires protégées sont cogérées avec elle. Cette capacité à mobiliser la population est un réel problème puisque les gestionnaires sont confrontés à différentes cultures sur terrain. Il y a également le blocage au niveau de la communication. Etant donné que la communauté locale n’a pas été mobilisée, elle ne connait pas ses responsabilités, ni ses attentes, ni ses intérêts par rapport à la gestion de l’aire protégée, qui représente une source de revenu économique et une base culturelle.
Bleen : Quels leviers allez-vous mobiliser pour réhabiliter la situation ?
M.R. : Nous allons donner des formations. Nous sommes actuellement en train de faire une étude afin de définir la politique de formation adéquate. Les cibles sont évidemment les gestionnaires des aires protégées, mais aussi les leaders communautaires. Pour rappel, les aires protégées sont cogérées avec les communautés locales, il est donc important de les intégrer dans le programme de formation. Par rapport à la définition de la politique de la formation, le programme est encore en phase de démarrage durant laquelle les résultats des évaluations des différents programmes de formations qui ont déjà existé seront mis en avant. Les résultats vont nous amener à identifier les besoins qui vont nous permettre de concevoir un programme de formation qui va cibler les intérêts des gestionnaires et des communautés locales.
Bleen : Quels sont le cœur du programme ainsi que ses objectifs ?
M.R. : Le programme a été initié et géré par la FAPBM. Les aires protégées qu’elle finance bénéficieront de cet accompagnement. La Fondation Hempel apportera le financement. Les cibles sont les gestionnaires des aires protégées à Madagascar ainsi que les leaders communautaires. La vision est de mettre en place un centre de ressources académiques de la biodiversité à Madagascar et de mettre en œuvre une formation continue pour les cibles citées précédemment.
Bleen : Pourrait-on connaître les sites qui bénéficieront de cet accompagnement ?
M.R. : L’étude nous le dira mais – à titre personnel – je pense que les sites qui comportent beaucoup de challenges devront en bénéficier prioritairement. Des consultants mettront en œuvre le projet.
Bleen : Selon vous, quels sont les défis auxquels les aires protégées font face?
M.R. : Il existe différentes pressions sur les aires protégées. Cependant je souligne ce manque de lien et de coalition entre les autorités avec certaines communautés ou les gestionnaires et les communautés. Les communautés ne sont pas intéressées à intégrer la gestion des aires protégées. Et c’est le plus grand défi pour la gestion de ces écosystèmes riches et dynamiques. Il faudra voir comment résoudre ce manque de collaboration.
Bleen : Etes-vous convaincue par le rôle que devraient jouer les communautés ?
M.R. : Je suis convaincue – certes pas à 100%, car il y a d’autres facteurs en jeu – que la collaboration et l’entraide résoudront plusieurs problèmes au niveau des aires protégées. La conscientisation des communautés mènera à une bonne gouvernance.