1.Quels sont les faits ?
Le mercredi 1er mai 2024, la police thaïlandaise a saisi plus de 1 000 tortues radiées et 48 lémuriens dont des Lemur catta. Elle a été informée de l’existence d’un convoi suspect de contrebande d’animaux sauvages en provenance de l’Indonésie. Les autorités thaïlandaises ont mené l’enquête, en collaboration avec le service américain de la faune et de la pêche, pour suivre et intercepter ce convoi composé de quatre véhicules dans un hôtel du district de Muang, dans la province de Chumphon, en Thaïlande.
2. Quelles étaient les destinations finales de ces animaux ?
Les deux espèces endémiques de Madagascar devaient être transportées vers Bangkok pour, ensuite, être acheminée vers la Corée du Sud et Taïwan afin d’alimenter les marchés de contrebande. « Les Comores et la zone sud-est de l’Asie font partie des routes empruntées par les trafiquants », indique le ministre de l’Environnement et du Développement Durable.
3. Y-a-t-il eu des arrestations ?
Selon les informations rapportées par la division thaïlandaise de la suppression de la criminalité liée aux ressources naturelles et à l’environnement, six suspects ont été appréhendés. Lors d’une conférence de presse organisée conjointement par le MEDD et l’administration douanière, le 4 mai 2024, Ernest Lainkana Zafivanona, directeur général des douanes, avait dévoilé que neuf personnes, de nationalité étrangère et malgache, avaient été déférées au Pôle anti-corruption (PAC) et que trois autres, soupçonnées d’être impliquées également dans ce trafic étaient recherchées.
Simon Rafanomezantsoa, de WWF Madagascar, avait expliqué que « la quantité saisie pointe fortement vers l’existence d’un réseau organisé de trafiquants, et de l’utilisation de la voie maritime pour faire sortir les animaux hors du territoire national. Cette importante saisie en Thaïlande démontre la nécessité de redoubler d’efforts dans la lutte contre le trafic des espèces uniques de Madagascar ».
4.Quelles sont les mesures prises ?
Une task force internationale pour lutter contre le trafic d’espèces sauvages et rapatrier des animaux saisis a été mise en place. Cette structure internationale impliquerait diverses entités, dont les autorités malgaches, thaïlandaises, malaysiennes, taïwanaises et Interpol ainsi que l’ONUDC, entre autres. La task force mènera les investigations. Lors de sa visite en Thaïlande, Max Andonirina Fontaine avait demandé à la justice thaïlandaise de « mener des enquêtes approfondies. Elle va travailler de manière très étroite avec les parties malgaches ».
5. Quand est-ce que les animaux devraient être rapatriés ?
Le MEDD, dans un communiqué de presse partagé à la fin de la mission ministérielle, parle d’un rapatriement « au plus tard à la fin du mois de juillet ». En attendant, les chercheurs malgaches et thaïlandais devraient travailler « conjointement pour les questions liées au traitement de ces animaux » en attendant cette période fatidique.
6. Une fois au pays, où seront accueillis ces animaux ?
Le Pr Jonah Ratsimbazafy nous avait confié que ces animaux ne seraient pas accueillis dans le Parc botanique et zoologique de Tsimbazaza, qu’il qualifie de « cimetière » pour les animaux. La piste envisagée est plutôt la réserve de Reniala qui accueille déjà un centre de conservation des maki catta, le Lemur Rescue Center. Ces lémuriens sont sauvés des trafics d’animaux dans le but d’être réintégrés à la vie sauvage.
7. Ces animaux seront-ils réintroduits dans leur milieu naturel ?
D’après les informations que nous avons recueillies, le refuge ne sera qu’une étape transitoire, mais les lémuriens et les tortues seront réintroduits dans un environnement adapté et protégé. Cependant, nous ne savons pas si un suivi des populations réintroduites sera effectué par des chercheurs locaux et internationaux. Dans son état naturel, le lémur catta est présent dans les fourrés épineux du sud et du sud-ouest de l’île. L’astrochelys radiata (tortue radiée) ou Sokake est emblématique des forêts épineuses du sud et sud-ouest de Madagascar
8. Qui prendra en charge les opérations ?
Les frais de rapatriement devraient être à la charge de la partie malgache, mais la Grande île a demandé l’appui d’organismes et de partenaires internationaux.
9. Quelles sont les peines encourues par les auteurs de trafics d’espèces de faune et de flore sauvage ?
La loi N° 2005‑018 du 17 octobre 2005 sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvage dispose que « la possession, l’achat, l’offre d’achat, l’acquisition à des fins commerciales, l’utilisation dans un but lucratif, l’exposition au public à des fins commerciales, la vente, la détention pour la vente, la mise en vente et le transport pour la vente de tout spécimen appartenant à une espèce » protégée sont passibles « d’une peine de six mois à dix ans d’emprisonnement et d’une amende de 10 000 000 à 200 000 000 ariary ».
Par ailleurs, « tout prélèvement d’animaux » venant d’une aire protégée constitue un crime passible de 2 à 10 ans de prison et d’une amende pouvant aller de 100 millions à 2 milliards d’ariary selon la loi n° 2015 -005 du 26 février 2015 portant Refonte du Code de Gestion des Aires Protégées.
10. Quelle est l’ampleur du trafic international d’espèces de faune et de flore sauvage de Madagascar ?
Le WWF Madagascar indique que la tortue radiée (Astrochelys radiata) ou figure parmi les tortues terrestres ayant le plus été l’objet de trafic dans le pays et dans le monde. Il faut dire que la valeur des animaux endémiques malgaches suscite la convoitise.
Le directeur général des douanes avait dévoilé que les lémuriens et les tortues saisis en Thaïlande pourraient valoir près de de 3 millions de dollars, soit l’équivalent de plus de 14 milliards d’ariary. « Le trafic de ces espèces constitue un préjudice écologique incommensurable », avait expliqué Ernest Zafivanona Lainkana.