Le spectacle est devenu tristement courant : une cinquantaine de « bidons jaunes » sont disposés devant une borne fontaine, dans le fokontany d’Ambolokandrina, en attendant leur tour. Si auparavant, ces contenants appartenaient pour la plupart à des ménages qui ne disposent pas de raccordement avec le réseau de la JIRAMA, la compagnie nationale d’eau et d’électricité, la situation a changé. Avec la crise de l’eau – qui ne touche pas qu’Antananarivo – même les foyers qui ont accès au réseau de la compagnie nationale doivent faire la queue comme d’autres.
Divers facteurs en sont la cause
La pénurie d’eau est un problème récurrent pour les habitants d’Antananarivo. La crise perturbe les activités quotidiennes des habitants de la capitale malgache. Certains y consacrent leurs nuits pour obtenir de l’eau. Parfois, même trois heures ne suffisent pas pour remplir bidons, barriques ou autres réceptacles permettant d’en avoir en réserve. Certains foyers restent éveillés et préfèrent s’installer près des bornes fontaines pour remplir leurs bidons qui leur serviront pour la journée.
« Il y a un déficit de 100 millions de litres d’eau par jour. Les besoins de la population tananarivienne sont de près de 300 millions de litres quotidiennement », dévoile Lalaina Nirina Andrianamelasoa, le ministre de l’Eau, de l’Assainissement et de l’Hygiène, sur les ondes de la télévision nationale. Fraîchement nommé, cet ingénieur hydraulicien doit faire face à sa première vraie crise de l’eau.
Et ce ne sera pas la dernière. La Ville des Mille est tributaire de la station de Mandroseza, construite en 1938, durant la colonisation. Peu d’investissements ont été consentis ces trente dernières années pour remédier à une problématique qui est appelée à s’aggraver ces prochaines années, si des solutions pérennes ne sont pas trouvées et adoptées.
Zones rouges
D’ailleurs, comme solutions, divers projets et programmes ont été lancés pour assurer un accès durable à l’eau potable ou pour parer au plus urgent, comme la mise en place de « Water Service Point by Jirama» dans divers quartiers de la capitale. Initialement, 3 030 points d’eau pour 330 fokontany d’Antananarivo et de Toamasina étaient bénéficiaires de ce projet d’approvisionnement en eau soutenu par l’Unicef.
Pour résoudre en partie ces problèmes d’approvisionnement en eau, l’exécutif a annoncé le projet de 35 forages effectués pour combler le manque d’eau. 7 seront faits à Antananarivo-ville, 14 dans l’Atsimondrano, 7 dans l’Avaradrano et 7 à Ambohidratrimo. Depuis 2022, le gouvernement malgache, à travers le Projet d’Amélioration de l’Accès à l’Eau Potable (PAAEP), a signé un contrat avec la Banque Mondiale, couvrant un budget de 220 millions de dollars, afin de proposer des solutions à cette pénurie d’eau. En 2020, 35 millions avaient été accordés à la Grande île par l’Union Européenne pour le projet Jirama Water III. Ce financement a été complété par un don de l’Union européenne au travers de la Plateforme d’Investissement pour l’Afrique (PIA).
Le projet concerne l’alimentation en eau potable d’Antananarivo, la capitale de Madagascar. Le projet consiste en l’augmentation de la capacité de production des usines d’eau potable, des ouvrages de transfert et du réseau de distribution ainsi que du remplacement de conduites vétustes.
Croissance et mauvaise gestion
Malgré les efforts de la Jirama, la société nationale de l’eau et de l’électricité, la situation persiste en raison de l’insuffisance et du vieillissement des infrastructures, du changement climatique, de la croissance démographique et de la mauvaise gestion des ressources, qui sont des facteurs aggravants. D’ailleurs, Ron Weiss, le directeur général de la Jirama, et les ministres chargés de l’Energie et de l’Eau ont été convoqués à Ambohitsorohitra avec le président de la République Andry Rajoelina, ce mardi 1er octobre. Le numéro Un de l’Etat avait enjoint le numéro Un de la Jirama de « prendre connaissance de l’ensemble des projets en cours et à réaliser pour la Jirama».
En attendant que les solutions se matérialisent, les habitants d’Antananarivo doivent prendre leur mal en patience. La plupart doivent composer avec leur bidon jaune, en attendant des jours meilleurs.
Aina Tahirisoa, Andy Soa, Dina Ratsimba et Tsanta Idealisoa
(stagiaires de la rédaction dans le cadre de la formation Jeunes Reporters Francophones)
📸 © Unicef Madagascar